ForeCast #11

Pierre Videau - Directeur Pôle Parapublic & Financement - Comment placer sa trésorerie aujourd'hui ?

Quels placements pour votre excédent de trésorerie en 2021

La crise sanitaire a profité à la liquidité de certaines trésoreries, mais l’optimisation de ce cash représente cette année un défi inhabituel.

Et pour cause.

Les placements sans risques et supérieurs à 0% sont totalement absents du marché.

Avant de se résoudre aux taux négatifs, les trésoriers doivent repenser leur stratégie de placements. 

Dans ce premier épisode de la rentrée, Pierre Videau, Directeur du pôle Parapublic et Financements chez Pandat Finance, nous livre une véritable boîte à outils du placement de trésorerie. 

Grâce à sa connaissance des pratiques du marché, Pierre présente avec méthode comment les trésoriers placent leur cash aujourd’hui : 

  • Quelles sont les stratégies possibles? 
  • Quels sont les produits adaptés au contexte actuel ? 
  • Ou encore quelles solutions peuvent encore offrir des rémunérations intéressantes ?  

Transcription de l'épisode

Introduction

– Bonjour Pierre, comment vas-tu ? 

-Très bien, merci beaucoup pour cette invitation pour parler un peu des placements de trésorerie. 

-C’est moi qui te remercie. Comme tu viens de le dire, on va parler des placements de trésorerie et plus particulièrement dans un contexte de conjonctures changeantes, dont la crise que nous traversons, mais pas seulement.  

Q : Peux-tu te présenter ? (00:01:15)

R : Je suis Pierre Videau, directeur des financements et directeur du secteur parapublic chez Pandat Finance. Je suis aussi commercial senior depuis maintenant 8 ans, à l’attention des personnes morales pour leur proposer des solutions de placement diverses et variées en fonction des catégories d’actifs sur lesquels ils peuvent aller. 

Q : J’imagine que tu dois avoir un certain nombre de cas de figure et que tu vois ce que font les trésoriers en ce moment. (00:02:04)

R: Ça bouge beaucoup depuis un an et demi, on a vu que la conjoncture s’était terriblement accélérée, alors que, quelque part, elle était connue entre la crise et le COVID puisqu’on était sur une tendance identifiée à l’avance, qui ne cessait de décroître en termes de niveau de taux. Mais aujourd’hui, il y a eu de gros mouvements liés à la crise sanitaire, et il a fallu être presque gymnaste pour pouvoir se raccrocher aux branches quand on était trésorier.

Q : Avant de rentrer dans le sujet de ce que font les trésoriers aujourd'hui, peux-tu nous parler de ce qu’on l’on faisait, historiquement, au niveau des stratégies et placements des entreprises ? (00:02:37)

R: J’ai évolué 6-7 ans sur des problématiques de placement de trésorerie, qui étaient assez similaires en termes de conjoncture ; la crise de 2008 a obligé la Banque centrale européenne à injecter massivement des liquidités dans l’économie via plusieurs de ses outils. Elle a aussi utilisé les taux, qui n’ont cessé de baisser pour permettre aux banques, mais pas que, de pouvoir se financer sur des conditions extrêmement basses afin de pouvoir réemployer ces liquidités pour le développement de nos économies. Depuis la crise de 2008, il y a donc eu sans cesse des baisses de taux successives, on s’en rappelle tous. Ça a duré une dizaine d’années, l’idée était vraiment d’apporter un soutien massif aux banques pour qu’elles puissent financer. Qui disait beaucoup de liquidités, disait des taux qui ne cessaient de baisser puisque les banques pouvaient se refinancer sur des conditions très attractives et n’avaient plus besoin d’aller chercher de la collecte vis à vis des entreprises sur des niveaux de taux compétitifs. On a donc vu une lente décélération des propositions attractives de la part des banques vis-à-vis des trésoriers d’entreprise. 

Q : Au niveau des trésoriers d’entreprises, quelles étaient les orientations qu'ils prenaient en termes de stratégie de placement ? (00:04:07)

R : C’était une stratégie plutôt opportuniste. Il y avait encore un dynamisme assez important puisque Bâle III est arrivé après la crise de 2008 en demandant aux banques d’assainir leur bilan. Un certain nombre de ratios ont été scrutés par les banques, notamment le ratio LCR, qui visait à permettre à la banque de faire face à un choc de liquidités pendant une trentaine de jours. Le compte à terme est arrivé comme étant un produit parfait pour rebilanciariser, réassainir le bilan des banques et il y a eu une proposition assez importante de la part de beaucoup de banques vis-à-vis des entreprises pour collecter sous cette forme-là, améliorer ces différents ratios et bétonner un peu les différents bilans. Les trésoriers ont vu arriver sur le marché des produits de placement très vanille dont la rémunération était connue à l’avance, dont les pénalités, si toutefois il y en avait, étaient connues à l’avance, ce qui a permis d’améliorer vraiment les prévisionnels de trésorerie pour tout ce qui est placement d’entreprise. 

Q : Observes-tu aujourd’hui toujours ces évolutions de baisse des taux et d’augmentation de liquidités, ou y a-t-il des inflexions ? (00:05:30)

R : Pendant la crise COVID, il y a eu une accélération de ces différents éléments. On a vu qu’il y avait une injection de liquidités pour permettre du développement, et les taux étaient en baisse parce qu’il y avait justement beaucoup de liquidités aussi sur ces économies.

Aujourd’hui, on est plus sur un modèle d’excédents de liquidités, d’une surliquidité extrêmement importante de la part des banques qui étaient déjà records avant la crise sanitaire. Les choses se sont accélérées : en un an et demi, on peut parler par exemple de 150 milliards d’encours nouveaux sur le premier confinement. On n’a pas pu dépenser notre argent. La politique budgétaire de l’État, notamment en France, a été extrêmement accommandante, donc il y a eu une création monétaire. On a tous économisé un peu plus et les banques l’ont ressenti puisqu’elles ont vu des encours nouveaux arriver sur les comptes courants et les livrets. Elles étaient déjà full cash, elles le sont encore plus après la crise sanitaire. Et par ricochet, la banque n’a absolument plus besoin de se refinancer sur des conditions attractives (j’entends par là du 0) puisqu’elle est gavée de liquidités. Le contexte d’aujourd’hui, c’est comment réemployer mes liquidités tout en gardant ou en espérant de la rentabilité. C’est ça qu’elle a actuellement beaucoup de mal à faire puisque la crise COVID, d’un autre côté, a potentiellement apporté un risque futur sur des créances douteuses en augmentation dans les bilans bancaires. 

Elle limite donc aussi le réemploi de ces fonds à usage ou de profil employeur très qualitatif, ou alors sur des projets très margés. Pour des projets très peu margés avec un risque certain, la banque réfléchit à 2 fois, même gavée de liquidités, à réemployer ces fonds pour financer la contrepartie. On est dans un monde où 2 messages s’entrechoquent et le COVID n’a fait qu’accélérer cela. Aujourd’hui, les offres de comptes à terme de produits strictement bancaires garantis en capital à tout moment sont extrêmement rares sur ce marché. C’est un désert.

Q : Du côté des trésoriers, est-on également sur des niveaux de liquidités record ? Trouvent-ils de quoi satisfaire leurs besoins en termes de financement ou de placement ? (00:08:16)

R : L’action des banques centrales fait qu’il y a beaucoup de liquidités dans le marché, donc en fonction des différents canaux de refinancement que vous avez, les liquidités sont normalement présentes. On voit qu’il y a quand même une très belle reprise, des développements projets très importants, donc au niveau du financement il y a beaucoup de liquidités et ça aide les entreprises à aller chercher du cash.  

Mais que faire quand on a du cash aujourd’hui ? C’est très délicat, parce qu’il n’y a plus d’offres ! A mesure que vos placements antérieurs arrivent à échéance, ou que vous n’avez pas optimisé votre structure de placement, alors vous vous enfoncez sur des rémunérations négatives et perdez de l’argent tous les jours. Pour un trésorier, c’est très dur de comprendre aujourd’hui que le 0 n’est presque plus un absolu. On est sur un benchmark économique qui est de – 0.50, le taux de dépôt de la BCE. Ce qu’on arbitre pour les trésoreries d’entreprises aujourd’hui, c’est ce – 0.50, et de plus en plus de placements sont à taux négatif. C’est vraiment la situation qu’on constate. Il y a manifestement une volonté de réemployer ce cash, mais il y a plus de liquidités dans l’économie et des trésoreries qui, en fonction de l’activité, sont en croissance ou en stabilité.

Q : Placer avec un risque faible et une liquidité élevée, au-dessus de 0, c'est compliqué aujourd’hui ? (00:10:05)

R : Oui. Aujourd’hui, il faut vraiment choisir les différents paramètres de son placement. On ne peut plus tout avoir ; si on cherche la sécurité à tout moment, il est maintenant très difficile d’avoir du 0. Si on cherche la liquidité, ça va également être difficile d’avoir du 0. Si on cherche une maturité courte, on n’aura absolument plus rien… On est dans une dans une situation où il faut se poser des questions : la stratégie opportuniste consistant à chercher les derniers comptes à terme, comptes courants que vous pouvez avoir sur le marché fonctionne-t-elle ? Ce n’est pas évident. Il y a très peu de poches et beaucoup de candidats. Les choses sont en pleine évolution. Différentes réflexions sont menées par des trésoreries en fonction de leur taille. Repenser son allocation, c’est quelque chose qui est essentiel et qui va l’être de plus en plus à mesure que le temps avance. 

Q : Si le placement sans risque et avec un taux non négatif devient l'exception, comment faire ? Quelles sont les pistes que tu peux proposer à des trésoriers ? (00:11:07)

R : Il y a plusieurs façons de réagir sur son allocation. Les différents éléments qu’il faut prendre en compte ont des dimensions de différentes natures. Les sociétés cotées vont avoir la nécessité, peut-être, de placer leur trésorerie afin qu’elle vienne en réduction de leur dette nette. Ils vont devoir respecter un cadre d’investissement extrêmement restreint, avec les offres et le désert sur ces différents marchés. Avec ces notions de cash, cash équivalent, ils tendent vers des OPCVM monétaires dont la rémunération s’approche peu ou prou de – 0.50 qui est, on le rappelle, le benchmark érigé par la Banque centrale européenne. 

On reste très négatifs. Et à mesure que le temps avance, lorsqu’on est une société cotée avec une grosse structure d’endettement et où l’investisseur va regarder justement ces différents ratios bilanciels, si la politique de l’entreprise est de rester strictement cash cash équivalent, la rémunération, le produit financier va s’affaiblir et on va rentrer en période négative sur la plupart de la trésorerie. C’est le cas aujourd’hui si on a à respecter ces problématiques de cash cash équivalent,  c’est à dire d’avoir de la trésorerie qui viendrait en réduction de la dette nette. 

Q : Globalement, on a deux choix : soit on accepte des taux négatifs et de perdre de l'argent sur du sans risque liquide, soit on revoit de manière sérieuse la stratégie de placement. (00:12:55)

R : Exactement. Et certains le font de plus en plus, ça fourmille en ce moment. Je travaille avec plusieurs entreprises sur une réallocation d’une partie de cette somme de cash. Beaucoup de trésoriers, lorsque c’est un sujet pour eux, se disent d’accord pour venir un peu en réduction de la dette nette car ils sont dans une structure très emprunteuse. Ou alors, ils sont peu emprunteurs du fait de la nature de leur activité et choisissent de réallouer une partie de la trésorerie qu’ils considèrent comme étant pérenne et sanctuarisable, sur une poche un peu plus long terme et sélectionner quelques actifs de natures différentes, pas strictement bancaire, c’est à dire compte à terme, compte courant. Il va regarder du côté des solutions obligataires, plusieurs actifs qui peuvent être diversifiants pour sa trésorerie, toujours en veillant à diversifier puisqu’on ne met pas tous ses œufs dans le même panier.

L’idée, c’est d’aller chercher et définir un matelas pérenne et de se pencher sur une allocation un petit peu plus diversifiante. Je travaille avec plusieurs clients sur ces différentes poches qui ont été décidées en conseil d’administration, parce que certains CAC 40, SBF 120 considèrent que le produit financier à maintenir vs. le risque, qui est considéré assez différemment d’une personne à une autre, peut valoir le coup par rapport aux problématiques de réduction de la dette nette au niveau des ratios. 

Q : On est sur des stratégies qui dépendent de la stratégie financière de l'entreprise. Ce n’est pas une formule magique à appliquer systématiquement, il faut que ce soit inscrit dans la stratégie globale du groupe ? (00:15:00)

R : Exactement. Il y a l’évaluation du risque : quel est cet actif, sur quoi j’investis, où est le risque… Il y a toujours un risque, que ce soit une banque qui ait une contrepartie dans laquelle vous avez un risque de contrepartie, une obligation sur laquelle vous avez un risque de contrepartie mais avec un risque en cas de sortie anticipée puisque vous êtes sur un prix de marché… Mais il y a toujours un risque en fonction de l’actif dans lequel vous allez investir. 

Donc, il faut évaluer ce risque ou évaluer la capacité de prendre du risque aussi. Ensuite, il faut se questionner sur les maturités possibles et sur les différents actifs qu’on va pouvoir regarder. 

Q : Si on considère que les placements sans risques ne sont plus accessibles, quelles sont les autres options qui existent et que tu vois le plus souvent utilisées par tes clients sur cette diversification de placements ? (00:16:02)

R : On ne va pas aller sur des choses extrêmement dynamiques en termes de taux. Il y a un premier pas ; déjà, quand on franchit le pas de sortir du compte à terme, du compte courant pur ou de l’OPCVM monétaire très liquide, on va dans un premier temps sur des produits à caractéristique obligataire. 

Plutôt qu’un compte à terme d’une grande banque nationale française avec laquelle vous travaillez de toute façon, vous allez vous poser la question d’acheter une obligation de cette même banque. Quelque part, vous portez déjà le risque dans votre portefeuille, dans votre bilan au niveau de la contrepartie. Si vous savez que vous pouvez sanctuariser une partie de votre trésorerie, vous considérez qu’en allant à maturité, vous êtes sur un risque totalement identique. 

Il y a donc toute la catégorie des produits obligataires et assimilés qui vont être très regardés dans un premier temps. C’est la première chose quand on essaie de sortir du strict cash, cash équivalent, c’est-à-dire des produits émis par une contrepartie bancaire de détail, donc compte à terme, compte courant.

Q : Quel niveau de rémunération peut-on en espérer ? (00:17:22)

R : C’est vrai que quand je parle d’obligation et assimilé, on peut aussi acheter un programme obligataire sur mesure, ce qu’on appelle une note EMTN (Euro Medium Term Notes) émise par une contrepartie sur un rang de créance de sa dette X ou Y. 

Q : Ce modèle est utile si on veut sortir du négatif, voire du zéro. C’est bien ça ? (00:17:44)

R : Tout à fait. On parle aussi de modification de la structure de paiement d’une obligation grâce à un SWAP, ce sont des choses qui se font beaucoup aujourd’hui. Je prends un exemple : vous avez une obligation en USD mais une trésorerie en euros. Une banque peut acheter une obligation d’une grande banque, soit payer en euros. Et vous vous rendez compte qu’à même maturité, vous avez un tout petit gain de rendement par rapport à l’obligation que vous auriez pu acheter en euros. Tout ça, c’est ce que j’appelle la catégorie obligataire et assimilés. 

Au niveau des rendements attendus, vous avez plusieurs caractéristiques, quelques paramètres qui rentrent en compte. En fonction de la qualité de risque ou la qualité de crédit de l’émetteur, vous allez avoir un niveau de rémunération qui sera plus ou moins élevé. C’est un jeu de vases communicants en termes de risques. Plus vous allez aller chercher une maturité longue et plus vous aurez de rendements sur une même contrepartie. Plus votre rang de créance en fonction de la contrepartie sera bas, plus il y aura de rémunération. Il faut savoir sur quelle maturité on va, sur quelle qualité de signature on veut se positionner. Pour ça, vous avez des agences de notation qui sont là justement pour identifier chacune des contreparties qui émettent des programmes obligataires. En plus, les trésoriers ont la capacité d’avoir leur propre analyse, parfois en interne. 

Q : Quelles sont les autres options qu'on peut avoir et comment se positionnent-elles en termes de ratio risque-rendements ? (00:19:18)

R : Le rendement-risque, c’est un rendement-risque de marché. Une fois que vous acceptez le risque de pouvoir sortir et de perdre du capital en cas de sortie imprévue avant le terme, vous n’avez plus qu’une analyse à faire : considérer si vous pouvez vous engager sur un BBB- car vous êtes vous-même BBB-, donc une obligation BBB- ne vous fait pas gonfler les risques. A ce moment-là, vous allez considérer que vous pouvez vous engager sur du BBB- sans problème. Vous considérez que votre trésorerie est sanctuarisable à 15 ans, donc vous allez chercher une obligation BBB- à 15 ans et surveillerez le rendement en fonction de toutes les obligations d’émetteurs BBB- à 15 ans. 

Sur ces produits obligataires, une fois qu’on accepte le Mark to Market, qu’on accepte de positionner une partie de sa trésorerie sur un rendement qui va sortir du champ compte à terme, compte courant, on peut avoir des rendements qui peuvent être bien boostés. Bien sûr, la conjoncture n’est plus ce qu’elle était avant crise de 2008, donc on ne parle pas de rémunérations qui vont dépasser les 10% sur des qualités de signature intéressantes.  

Un autre produit que je vois beaucoup, on en fait énormément depuis ce début d’année puisque ça remplace un peu l’absence de produits bancaires sur le marché : les contrats de capitalisation. Pour faire très simple, c’est un peu un contrat d’assurance vie. Un assureur va proposer un contrat dans lequel vous allez être le donneur d’ordre pour faire une allocation fonds euros, qui est l’actif général géré par la compagnie d’assurance chez qui vous prenez votre contrat, et garanti en capital brut ou net en fonction de certains. Et l’assureur, dans le cadre de son contrat assurance vie pour les particuliers mais aussi contrat de capitalisation qui peuvent être proposés aux entreprises, va vous proposer, dans le cas d’un contrat de capitalisation, un certain pourcentage, une certaine allocation d’accès à son fonds euros. 

Avec par exemple 70% sur son fonds euro, vous devrez faire 30% d’unités de compte. L’unité de compte, c’est une espèce de cadre vide, toujours inclus dans ce contrat de capitalisation dans lequel vous pouvez mettre différents actifs. Vous pourriez très bien mettre un fonds obligataire ou une obligation en direct, un produit structuré ayant un sous-jacent action. Dans l’unité de compte, vous pouvez référencer beaucoup de choses, mais l’idée est d’avoir accès aux fonds euros, en tout cas partant du postulat d’un trésorier d’entreprise qui a une volonté : liquidités garanties en capital au maximum et visibilité sur ses encours futurs. Partant de là, prendre un minimum de risques c’est aller chercher des rendements assurantiels sur ce fonds euros en ayant une petite partie un peu plus diversifiée qui n’aura pas forcément toutes les caractéristiques souhaitées au niveau de la garantie en capital en cours de vie. Néanmoins, le package peut vous permettre d’aller chercher des rendements supérieurs à 0 en prenant un minimum de risques. 

Q : Donc pour un trésorier dont le l'objectif est simplement de sortir du taux négatif, et pas forcément de réaliser des rendements très importants, comment choisir entre contrat de capitalisation et produits assimilés ? (00:22:47)

R : L’avantage du contrat de capitalisation, c’est que vous pourriez potentiellement mettre ce que vous voulez en unités de compte et vous avez, grâce à ça, accès aux fonds euros, à l’actif général garanti en capital brut ou net d’une contrepartie compagnie d’assurance.  

L’accès à ce fonds euros est très intéressant pour les trésoriers d’entreprise, surtout qu’aujourd’hui les assureurs vous donnent une liquidité, c’est-à-dire une capacité de récupérer vos fonds, parfois avec des pénalités, mais une capacité de récupérer vos fonds souvent inférieure au mois. La compagnie d’assurance a le droit de donner l’éligibilité à telle ou telle contrepartie à son fonds euros. Elle est vraiment maître de l’éligibilité via des déontologues. Tout le monde n’a pas le droit ou l’accès au fonds euros de toutes les compagnies d’assurance.  

Quand vous avez accès à ce produit, généralement, c’est la solution qui est regardée en premier lieu du fait de la garantie en capital qu’offre le fonds euros. Au niveau des rendements, on est souvent aujourd’hui encore entre 0,50 et 1,5% net par an. Même si les rendements s’affaissent d’année en année, on est encore dans un range assez intéressant en termes de rémunération annuelle. Et je parle de net. 

Q : Les obligations et les contrats de capitalisation sont le type de placement le moins risqué, au-delà des placements à taux négatifs possibles pour les trésoreries. Quelles sont les autres options, peut-être un peu plus risquées ? (00:24:40)

R : On voit 2 catégories d’actifs qui sont très regardées. Premièrement, l’immobilier. Les SCPI et toutes les solutions immobilières proches de cette pierre papier. La SCPI, c’est un fonds immobilier 100% d’actifs immobiliers du bâti. Mutualisation : tous les investisseurs dans une SCPI permettent aux gérants de cette SCPI d’acheter des immeubles et de les louer. 

En fonction du risque que vous pensez être sur l’immobilier, ça peut vous apporter des rendements assez pérennes dans le temps. En tout cas, les rendements se tiennent depuis des années entre 4 et 5% nets par an. Vous avez plusieurs thématiques, le bureau, la santé, les locaux commerciaux… Vous avez aussi plusieurs localisations géographiques. C’est très Paris intramuros, où l’asymétrie de l’offre et de la demande permet d’avoir une régularité des rendements et une certaine certitude de toucher son loyer, et donc son rendement, à la fin du mois. 

Q : Ici, le risque que comprend le placement, c’est le risque sectoriel. Puisqu’on est sur des marchés connus avec des types d’immobilier bien définis, le risque est mesurable ? (00:26:02)

R : Exactement. Vous savez normalement dans une SCPI les immeubles desquels vous aurez une part.  

Autre partie, c’est toute la catégorie des Autocalls, des produits structurés ayant des sous-jacents actions. Vous pouvez prendre un sous-jacent qui serait une action comme Total, ou alors comme le CAC40. Imaginons qu’aujourd’hui le CAC40 est à 6400 points ; vous regardez dans un an le CAC40 et constatez qu’il est à 6450 points. Vous toucherez peut-être un coupon de 4%. Et votre produit rappelle, vous récupérez 100% de votre capital plus 4%.  

La possibilité que vous perdiez du capital, c’est que le CAC40, parce que vous avez défini une maturité à 10 ans, ne soit jamais, à chacune des constatations, au-dessus du 6400, et que dans 10 ans il ait même perdu 50% de sa valeur, donc 3200. Tout est possible dans le monde des actions ! On parle de produits plus risqués. Vous pouvez modifier la barrière de risque en capital à maturité. Là, on parlait de 50%, vous pouvez la mettre à 40%, 60%, c’est vous qui ajustez. 

Q : L'idée, c'est de définir des options et des niveaux de risque que l'on souhaite avoir par rapport à des placements risqués sur les marchés action. (00:27:37)

R : Exactement. Il y a une vraie conviction qui entre en jeu. Il y a vraiment des produits qui sont totalement sur-mesure et faits pour l’entreprise en fonction de sa conviction. C’est la possibilité d’aller chercher sur une toute petite partie de sa trésorerie des rendements qui peuvent être franchement plus intéressants. 

Q : A combien estimes-tu la part de placements que font les trésoriers à ce niveau de risque ? (00:28:02)

R : Si tous les actifs diversifiés que l’on évoque depuis tout à l’heure correspondent à 10% maximum des sociétés qui sont en capacité d’allouer une partie de cette trésorerie, on prend dessus 90% d’obligataires et assimilés, potentiellement de contrats de capitalisation. Après, vous voyez ce qu’il reste pour les produits type Autocalls et SCPI. C’est vraiment de la diversification pure et dure en fond de cuve pour permettre d’aller chercher un produit financier qui pourrait compenser un petit peu les pertes de rendement sur tout ce qui est taux négatif.

Q : Le trésorier est quand même contraint en interne par un certain nombre de facteurs : sa position, le placement du cash de son entreprise... Quelles sont les éléments qu'il doit prendre en compte pour déterminer sa stratégie et faire de ces différentes options un choix pertinent pour son entreprise ? (00:28:52)

R : Il doit déterminer la fluctuation de son cash. Demain, il va se rendre compte par des analyses historiques, des back testings, de sa trésorerie, mais aussi l’activité et le matelas de trésorerie qui sera décidé. C’est ça la clé : définir la poche sanctuarisable. Certaines entreprises n’ont pas la possibilité d’avoir une poche sanctuarisable puisqu’elles vont être structurellement empruntrices. Ou alors, au contraire, des entreprises vont se dire que demain, il est possible que leur management souhaitant faire de la croissance externe leur demande de leur fournir la totalité du cash à disposition plus financement pour acquérir une autre boîte ou pour lancer une activité à l’étranger.

En tout cas, il y a certaines stratégies qui permettent au trésorier de garder un trésor de guerre pérenne, identique dans le temps en termes de montant, ce qui peut venir en diversification plutôt que s’amoindrir à mesure que le temps avance à cause des taux négatifs.  

C’est vraiment là qu’est la clé : définir son matelas, celui qui restera toujours là, son trésor de guerre, son fond de cuve. Les trésoriers ont beaucoup d’expressions pour matérialiser cette partie-là qui représente souvent entre 5 et 10% peut-être de la totalité du cash disponible d’une entreprise. Mais c’est se cash là que vous pouvez utiliser pour diversifier, aller chercher une allocation qui va vous permettre d’aller chercher un rendement qui pourrait potentiellement compenser la perte des revenus de la grosse partie liquide. 

Conclusion

– C’était très clair, je te remercie beaucoup Pierre pour toutes ces informations. 

– Merci Jean-François, à bientôt. 

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